Litige avec l'architecte : comment faire ?

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Vous avez confié vos travaux à un architecte en pensant qu'il s'occupera de tout. Mais, bientôt, selon vous, tout va mal ; l'architecte vous exaspère, vous souhaitez faire des changements, vous constatez des malfaçons, le chantier prend du retard, etc.

Pas de panique ! Travaux.com récapitule vos droits et devoirs.

Quels sont les principaux reproches présentés par le client à son architecte pendant la phase des travaux ?

Tout dépend de la nature du chantier, par définition unique, qu'il s'agisse de construction, rénovation ou réaménagement. Toutefois, Alain Diatkine, responsable de la commission litige du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) des Pays de Loire, des cinq à six cas de litiges reviennent fréquemment.

Tout d'abord, le client peut reprocher à son architecte maître d'œuvre le dépassement des coûts du chantier, la notion d'aléas de chantier étant souvent mal vécue. Par ailleurs, le client (maître d'ouvrage), peut également contester les travaux supplémentaires, dus selon lui à une mauvaise définition des travaux pendant la phase d'étude. Il arrive également que les retards de chantier soient imputés à tort ou à raison à l'architecte.

De plus, les malfaçons constatées sont souvent sources de malentendu. En effet, explique Alain Diatkine, «elles ne peuvent normalement pas être reprochées au maître d'œuvre, à moins que ce dernier n'ait pas assuré sa mission de surveillance du chantier». Or cette notion de surveillance prête à confusion. En effet, un architecte peut l'exercer en se rendant deux ou trois fois par semaine sur le chantier alors que le maître d'ouvrage souhaiterait qu'il soit constamment présent par exemple.

Enfin, le client peut également reprocher à son architecte un défaut de coordination des entreprises travaillant sur le chantier, «si l'architecte est missionné pour une mission de coordination des entreprises sur le chantier», précise le responsable du CROA.

Le client a-t-il le droit de modifier certaines clauses du contrat le liant à l'architecte pendant la phase de construction, notamment changer les entreprises, faire modifier certains éléments de la construction ou retirer des lots du chantier de la surveillance du maître d'œuvre ?

«Tout contrat d'architecte peut être modifié par un avenant», explique Alain Diatkine, responsable de la commission litige du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) des Pays de Loire. Vu qu'il s'agit d'un contrat privé, il n'existe aucune limite, «dès lors qu'il y a consentement entre les parties». Concernant le remplacement des entreprises, l'architecte n'a pas véritablement de prise directe, puisque l'entreprise est directement liée par contrat avec le maître d'ouvrage. Dans ce type de situation, l'architecte a une mission de conseil. Le client peut donc demander l'avis à son maître d'œuvre mais il n'est pas tenu de le suivre. Il s'agit de sa responsabilité.

Lorsque le client se promène sur le chantier et estime qu'une disposition prévue au départ doit être changée, dans le cadre d'un réaménagement par exemple il décide qu'il veut finalement un parquet en bois au lieu d'un carrelage, il peut modifier le contrat avec l'accord de l'architecte. S'il prend sa décision avant la réalisation effective, cela ne pose généralement aucun problème. S'il se ravise après la pose, ce sera également de sa responsabilité et donc à ses frais. Attention cependant, le maître d'ouvrage ne doit pas donner l'ordre de changement directement aux entreprises mais passer par l'intermédiaire de l'architecte.

Au sujet des lots de chantier, «c'est à négocier avec l'architecte», estime le responsable du CROA des Pays de Loire. «Si le client est un spécialiste de la peinture et veut finalement la réaliser par lui-même, il en a tout à fait le droit». Le client peut éventuellement espérer dans ce cas que les honoraires fixés au départ soient revus à la baisse en fonction des travaux qui ont été retirés de la mission de l'architecte.

«Ce dernier peut cependant ne pas accepter cette situation et donc demander le respect des accords fixés par le contrat, notamment le maintien de ses honoraires tels quels». Le conseil d'Alain Diatkine pour éviter que la situation ne s'envenime : «privilégier la négociation».

Attention cependant à ne pas changer d'avis trop souvent. Ce motif peut conduire l'architecte à se lasser et à rompre le contrat.

Le chantier prend du retard. Qui est responsable ?

En règle générale, «l'architecte ne peut pas être tenu pour responsable», explique une responsable du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) de Midi-Pyrénées. «La responsabilité en incombe aux entreprises travaillant sur le chantier». Lorsque celles-ci ne tiennent pas leurs engagements, l'architecte doit tout mettre en œuvre pour les contraindre à respecter leur contrat par l'envoi de lettres recommandées et de mises en demeure auprès de l'entrepreneur.

Lorsque les délais sont dépassés, des pénalités financières de retard peuvent être appliquées aux entreprises. «C'est à l'architecte de s'occuper de calculer les montants et de les déduire du montant des travaux réalisés par les entreprises», précise Alain Diatkine, vice-président du CROA des Pays de Loire. Reste que ce dernier peut également être rémunéré pour les délais supplémentaires. Il doit donc prévenir son client de la situation.

Toutefois pour éviter un dépassement de budget pour le maître d'ouvrage, le contrat type édité par l'Ordre des architectes prévoit une clause spécifique où «le montant des honoraires supplémentaires peut être déduit du marché de l'entreprise responsable, à condition que la déduction soit prévue dans la clause relative aux pénalités de retard du CCAP de ce marché». Il faut également répercuter cette disposition dans le contrat de l'entreprise.

L'architecte n'est responsable que dans de très rares cas. Notamment lorsque celui-ci a établi lui-même le planning et ne l'a pas suivi ou lorsque le client constate que le maître d'œuvre n'a pas mis en œuvre tous les moyens à sa disposition pour faire respecter les engagements des entreprises, «sous peine de payer à son tour des pénalités», assure Alain Diatkine.

Le maître d'ouvrage constate des malfaçons pendant le chantier ou des non-respects par rapport au cahier des charges. Quelle est la responsabilité de l'architecte ?

L'une des missions de l'architecte sur le chantier est de s'assurer que les travaux sont réalisés de manière conforme à ce qui a été prévu dans le contrat de travaux passé avec les entreprises.

«Si par exemple le descriptif prévoyait de la peinture rouge pour les murs et ils ont finalement été peints en verts, il faut que l'architecte le consigne dans les procès verbaux de chantier», explique-t-on au du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) de Midi-Pyrénées. C'est donc ensuite de la responsabilité de l'entreprise de reprendre les tâches mal effectuées et de les rendre conformes aux prévisions. Et à l'architecte de s'assurer que les travaux soient bien réalisés cette fois.

Toutefois, lorsque l'architecte estime qu'il n'est plus possible d'assurer la réparation.
Deux cas de figures peuvent se présenter. Selon le CROA de Midi-Pyrénées, il faut rédiger une déclaration de sinistre, et voir si l'assurance de l'architecte et/ou l'assurance Dommage Ouvrage (DO) contractée par le maître d'ouvrage peuvent apporter une indemnisation à ce dernier. Lorsque cette situation se produit, le recours à l'assurance et son résultat ne semblent pas assurés. «L'assurance ne fonctionne pas tout le temps, suivant l'importance de la malfaçon», prévient Alain Diatkine, du CROA des Pays de Loire. «De plus, en cours de chantier, c'est l'assurance de l'entreprise qui doit couvrir les malfaçons. Celle de l'architecte intervient lorsque le maître d'ouvrage a réceptionné les travaux et constaté des malfaçons après».

Le responsable du CROA ne voit donc que les tribunaux en ultime recours possible pour apprécier ce type de litige.

Le maître d'ouvrage peut-il contester le dépassement des coûts de chantier ?

Lors du choix des entreprises avant le début des travaux, les devis présentés par les entreprises sont préalablement acceptés par le maître d'ouvrage.
Lorsqu'ils ne correspondent pas aux factures finales, cela peut provenir de deux causes.

Dans le premier cas, l'architecte a oublié de prendre en compte des éléments importants de la construction et qui nécessitent des travaux supplémentaires.
Prenons un exemple gros comme une maison : l'architecte a oublié l'installation de l'escalier ou celui-ci ne peut pas passer par les portes d'entrées. Dans ce cas, sa responsabilité est engagée.

Seconde possibilité : le chantier révèle des difficultés cachées qui vont donc aussi provoquer des dépenses supplémentaires. Par exemple, lors de l'installation des fondations, les ouvriers et l'architecte découvrent un ruisseau souterrain qui n'apparaissait pas dans le POS. La responsabilité de l'architecte ne peut être engagée sur de tels aléas et il faut donc en accepter les conséquences.

L'architecte ne peut plus assurer la mission qui lui a été confiée. Comment continuer le chantier ?

Il s'agit d'un cas de figure qui doit être mentionné dans le contrat. Si l'architecte est par exemple gravement blessé et ne peut donc plus assurer sa mission, il doit proposer à son client un remplaçant. L'Ordre des architectes peut également intervenir et proposer au maître d'ouvrage un substitut lorsque les deux parties ont signé un contrat type de l'institution. «Il ne risque toutefois pas d'être une grande aide», atténue un responsable du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) des Pays de Loire.

«On pourra toujours donner une liste de noms, déjà disponible dans l'annuaire, mais pas de professionnels qui puissent se rapprocher précisément avec le projet de départ».

Il s'agit là bien entendu d'un empêchement de bonne foi, la bonne volonté de l'architecte ne pouvant être mise en cause. S'il s'agit d'un architecte de mauvaise foi - «J'ai décidé de passer deux mois aux Baléares avec ma copine» (c'est rare heureusement) - ne reste qu'à prendre un avocat et contacter l'Ordre des architectes.

Avant d'entamer une procédure contre l'architecte, quels sont les moyens existants pour l'inciter à résoudre les problèmes qui se sont fait jour ?

«Il n'existe pas de règles en la matière», estime Alain Diatkine, du conseil régional de l'Ordre des architectes des Pays de Loire.

Ainsi, pour des petits tracas qui ne prêtent pas à grosses conséquences, une bonne discussion franche et cordiale suivie d'un compromis, d'une poignée de mains et d'un avenant au contrat peut suffire.

Par contre, si les désaccords sont plus conséquents, il est judicieux de rappeler les obligations de chacun par voie épistolaire. Le client peut envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception pour enjoindre l'architecte de résoudre le problème. Passé un certain délai -«là encore il n'y a pas de règle», précise A. Diatkine ; «on peut laisser passer 15 jours» - la prochaine étape passe par la mise en demeure.

Cette dernière peut prendre la forme d'une assignation délivrée par un huissier ou par un courrier toujours en recommandé avec accusé de réception. Si, et seulement si, après ces deux étapes et passé à nouveau un délai d'attente raisonnable, la situation conflictuelle demeure, alors la relation peut évoluer jusqu'au contentieux.

Le client ne s'entend plus du tout avec l'architecte. A-t-il le droit de s'en séparer ?

«Tout contrat peut être résilié», estime-t-on au Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) de Midi-Pyrénées. «Auquel cas, cette décision doit être justifiée par un comportement fautif de l'architecte».

Lorsqu'il s'agit d'une rupture unilatérale, pour incompatibilité d'humeur par exemple, l'architecte peut exiger un dédommagent financier dont le montant peut être fixé lors de la signature du contrat.

«Dans les contrats édités par l'Ordre, il a été fixé à 20% des honoraires prévus pour la tâche qu'il devait réaliser», explique la responsable du CROA. Comme les contrats sont libres, ce taux est susceptible d'être modifié. De plus, l'architecte doit être payé pour les opérations qu'il a déjà supervisées.

De son côté l'architecte peut-il également mettre fin à son contrat le liant au maître d'ouvrage ?

C'est possible en effet. «Mais la décision doit être motivée», intervient Alain Diatkine, président de la commission 'litiges' au sein du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) des Pays de Loire. «L'architecte peut reprocher plusieurs choses à son client, notamment le fait qu'il ne l'ait pas payé, lui ou les entreprises, dans les conditions prévues par le contrat, des changements inopinés non-contractuels ou encore le fait que le client remette en cause l'autorité du maître d'œuvre sur le chantier en donnant des ordres directement aux entreprises».
Attention toutefois, s'il s'estime lésé, «l'architecte peut également demander une compensation», poursuit Alain Diatkine. Bref, dans ce cas de figure, il faut avant toute chose privilégier la négociation.

Si le maître d'œuvre ne suit plus le chantier, que devient le projet défini d'un commun accord ?

Lorsque le contrat a été rompu «l'architecte peut être remplacé par un autre architecte ou par un conducteur de chantier», explique une responsable du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) de Midi-Pyrénées.

Pas de panique, cela ne veut pas dire pour autant qu'il faille reprendre le projet depuis le début. «La maison devra au final correspondre aux plans du premier architecte, car l'architecte remplacé dispose d'un droit de propriété intellectuelle», précise-t-elle.

Dans les faits, «le nouvel architecte devra informer son prédécesseur qu'il a été sollicité pour reprendre la suite», explique Alain Diatkine, président de la commission 'litiges' au sein du Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) des Pays de Loire. «Il doit également lui demander l'autorisation, en accord avec le maître d'ouvrage, d'opérer quelques changements par rapports aux plans prévus. Le premier architecte peut tout à fait refuser les modifications envisagées. Par contre, il ne peut pas s'opposer à ce que ses plans soient utilisés pour l'achèvement des travaux en cours, du moment qu'ils ont été payés».

En clair, le projet peut prendre un peu de retard mais doit en toute logique être mené à bien.

Le conflit avec l'architecte s'envenime. A qui peut s'adresser le maître d'ouvrage ?

Même si les Conseils d'architecture d'urbanisme et d'environnement (CAUE) reçoivent des particuliers pour des litiges pendant la durée des travaux, leurs conseillers ne sont pas habilités dans ce cadre particulier à offrir leur médiation. «Nous travaillons en amont, bien avant la signature d'un contrat, pour des conseils sur les projets», explique Sophie Boegner, directrice de la Fédération nationale des CAUE.

La médiation est en effet l'une des attributions de l'Ordre des architectes, qui invite donc les particuliers et les architectes inscrits à soumettre leur(s) litige(s) et engager une conciliation entre les deux parties. «On peut nous saisir avec une lettre simple qui comprend un courrier explicatif et une série de documents utiles comme une copie du contrat, une copie des échanges de courrier et des photos du projet et du chantier», explique un juriste de l'Ordre dans les Pays de Loire.

L'organisation des séances de conciliation peut varier d'une région à une autre. Ainsi, en Bretagne, l'Ordre dépêche le conseiller le plus proche du lieu du litige pour l'arbitrer. Dans les pays de Loire, l'architecte et le client en conflit (éventuellement accompagnés de leurs avocats) se réunissent avec plusieurs membres de l'Ordre pour trouver une solution à travers une ou plusieurs séances de débats contradictoires.

Si la conciliation échoue, il ne restera plus comme option que la procédure judiciaire devant le Tribunal d'Instance, chambre civile, le plus proche du lieu d'habitation du plaignant. Ce sera au juge d'apprécier le degré de responsabilité de chacun et le(s) préjudice(s) subi(s). Toutefois, dans ce cas, il faut s'armer de patience. En effet, le contentieux peut s'éterniser, «surtout si le juge demande des expertises auxquelles va succéder des contre-expertises», estime Alain Diatkine, du CROA des Pays de Loire. Bref, le litige peut durer de long mois voire plus d'un an. «D'où l'intérêt de passer au préalable par la conciliation», préconise le responsable régional.

Dernier conseil de l'Ordre des architectes, qui permet d'éviter la phase judiciaire ; le recours en amont au contrat qu'il a lui-même réalisé et dont copie peut être consulté sur son site Internet (www.architectes.org).

Pour le Conseil régional de l'Ordre des architectes (CROA) de Midi-Pyrénées, «la signature d'un tel contrat permet de résoudre nombre de conflits avant même qu'ils ne se produisent».

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