Litiges avec les entreprises : comment les éviter et les résoudre ?

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Les litiges avec les entrepreneurs et les artisans sont divers puisque chaque chantier est unique. Certains se règlent facilement, à l'amiable, une solution qui doit être privilégiée. Parfois il est pourtant nécessaire de faire appel à la justice.

Quels sont les litiges les plus fréquents ?

Les malfaçons sont en tête du hit parade des litiges entre professionnels et particuliers mais en réalité, il y a autant de sources possibles de litiges qu'il y a de projets, d'entrepreneurs et de maîtres d'ouvrage.

Quand il engage des travaux, la première crainte des maîtres d'ouvrage  "le particulier en l'occurrence" est de se faire avoir. En témoigne une enquête de Cetelem. Selon cette étude, 83% des personnes interrogées avouaient leurs craintes d'une entourloupe. Pour autant, les litiges entre particuliers et artisans du bâtiment sont-ils en régression ou en augmentation ? Difficile de trancher la question.

Ainsi, selon Martine Faury, avocate exerçant à Angoulême (16), «les conflits sont assez rares et portent surtout sur des questions de retard de paiement et de malfaçons». Selon elle, le recours croissant aux compagnies d'assurance a drastiquement fait baisser le nombre de conflits. «Quand je débutais ma carrière, les responsables chez qui je travaillais pouvaient passer une journée sur ce type de dossier», explique-t-elle. Aujourd'hui, ce ne serait plus le cas.

De son côté, Ludovic Denys, avocat spécialisé dans le droit de la construction et inscrit au barreau de Lille (59), a une vision diamétralement opposée de la situation. Selon lui, au contraire, le nombre de recours irait plutôt en s'accroissant. Pour preuve, «il existe à Lille une chambre spécialement consacrée au droit de la construction», explique-t-il. Paradoxalement, ce spécialiste attribue cette recrudescence aux… assureurs et aux assistances juridiques prévues dans leurs packaging. «Du coup, les particuliers ont plus de facilités pour lancer une procédure», estime-t-il. Toutefois, comme à Angoulême, les raisons des conflits les plus fréquents restent inchangées : essentiellement des litiges sur des malfaçons.

Pourtant, les causes de litiges ne manquent pas. D'autant plus que, chaque chantier étant unique, des sources de conflit 'originales' peuvent apparaître à l'occasion, par exemple des questions de remblais sur un terrain en pente. Cependant, outre les situations déjà citées, les conflits habituels concernent généralement des différents sur les acomptes, sur les clauses du contrat, sur les abandons de chantier, sur les retards de livraison ou encore sur les vols sur le chantier. Dans chacun de ces cas de figure, le recours à la Justice reste parfois la seule et unique solution une fois que toutes les procédures à l'amiable ont été épuisées, surtout quand l'entrepreneur, ayant livré la maison, fait la sourde oreille.

Il est possible de se protéger en amont des travaux en détaillant avec une précision d'horloger le devis ou le contrat de construction. Notamment en vérifiant en premier lieu les attestations d'assurances. «Il s'agit pour l'entreprise d'une obligation d'en posséder sous peine de sanctions pénales», rappelle Ludovic Denys.

Par ailleurs, vous pouvez également faire jouer, toujours pour le contrat de construction, les différentes garanties, ainsi que les échéances déterminées avant la signature du document pour le règlement.

Ne jetons pas toutefois la pierre aux artisans qui ne sont pas tous des escrocs en puissance, bien au contraire. «Ceux qui multiplient les malfaçons disparaissent vite de la profession», indique Martine Faury. Toutefois, la faute du litige peut également retomber sur le particulier. «Plusieurs affaires sont le fait de clients qui retiennent l'argent pour des raisons plus ou moins fictives», explique l'avocate. Tendance confirmée par son confrère lillois. «Les personnes arguent de malfaçons et après expertise, on se rend compte qu'il n'y avait rien du tout», estime Ludovic Denys. «Ce genre de situation met les petites entreprises en difficulté financière».

De fait, comme le rappelle le Centre de Conseil et Assistance aux usagers de l'habitat (CDAU), une association qui sert de médiateur entre l'usager et le professionnel en cas de litige, parfois c'est le client qui en demande trop, qui veut une belle maison sur un beau terrain pour  76.000 euros. Pour rentrer dans de petits budgets, le commercial qui vend la maison tire sur tout et à la fin c'est toute la qualité qui pâtit et il y a du coup tellement de problèmes que personne n'est content. Le client doit aussi comprendre qu'avec 60.000 euros de budget, il obtient une maison à 60.000 euros. Enfin, il faut faire la part des promesses du commercial qui vend la maison que les techniciens ont ensuite bien du mal à réaliser dans le cadre du budget ou du temps impartis.

Quelles sont les échéances de règlement des travaux ?

L'entreprise ne peut exiger tout ou partie du montant des travaux à réaliser avant d'avoir signé le contrat ou le devis décrivant l'ensemble des opérations. Des acomptes sont prévus pour de grosses opérations - réfection d'une toiture par exemple - mais pas pour de petits travaux -refaire la peinture du salon. Et toujours après accord des deux parties.

Demander de l'argent avant de signer un contrat pour des travaux est formellement interdit. Pour Ludovic Denys, avocat spécialisé dans la construction basé à Lille (59), cette situation est sans équivoque. «S'il prend de l'argent et qu'après il devient difficile de poursuivre les travaux, l'entrepreneur peut être poursuivi pour escroquerie devant le tribunal correctionnel», poursuit le spécialiste. Bref, avant de vous engager par contrat, vous ne devez rien à l'entreprise de construction.

C'est après que cela se complique car tout dépend de la taille des travaux prévus. Ainsi, dans le cadre d'une construction neuve par exemple, vous pouvez vous mettre d'accord avec l'entrepreneur sur les modalités de paiement lorsque vous souscrivez un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) ou une vente en futur état d'achèvement.

C'est d'ailleurs en raison de l'important nombre d'abus que le législateur a prévu une législation spécifique à la construction de maisons individuelles désormais encadrée par la loi du 19 décembre 1990 et codifiée dans le Code de la Construction et de l'Habitation (articles L 231-1 et R-231-1). L'expérience montre désormais, dans le cadre de ce contrat, il y a très peu de litiges conflictuels (entendu qu'il peut y avoir des malfaçons ici ou là mais rien de comparable aux abus souvent encore constatés lorsque la construction n'est pas encadrée par un CCMI).

Pour des prestations simples, par exemple faire appel à l'artisan peintre pour repeindre les murs du salon, le règlement des travaux doit se faire clairement à la fin de la prestation, quoique «la loi ne prévoie rien pour l'artisan» dans ce cadre, précise M. Denys. Bref, pas d'acomptes, pas de paiement en cours de chantier mais un règlement intégral à la réception. Encore s'agit-il de s'entendre sur l'importance de la prestation. En effet, pour les prestations plus importantes, «l'entreprise est fondée à demander un acompte à la commande pour couvrir son achat de fournitures», explique une fiche explicative de l'Institut national de la consommation (INC - 60 millions de consommateurs). Elle peut également demander un versement au début du chantier puis le solde à la remise de la facture. «L'usage veut que cela soit 30% avant, 30% pendant et 30% après le chantier» précise Ludovic Denys. Puisqu'il s'agit d'un usage, toute autre solution est négociable à condition cependant que les termes acceptés de part et d'autres soient clairement spécifiés dans le contrat.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que quand le maître d'ouvrage demande une augmentation de la mission (remplacer une fenêtre par une baie par exemple) ou une modification en plus ou moins value du montant des travaux (remplacer les tuiles prévues pour le toit par des ardoises), même partielle des documents approuvés, cela a un coût dont tout ou partie du règlement peuvent être exigés. Pour reprendre l'exemple de la fenêtre, l'entrepreneur a déjà avancé les fonds pour son achat, il peut donc vous demander de rembourser immédiatement l'achat de la baie. Enfin, lorsque des réserves sont formulées à la réception des travaux, le client peut consigner une somme qui ne peut excéder 5% du prix convenu à la signature du contrat et doit être restituée après la levée des réserves. Quand il n'y a pas de réserves, la somme restant à payer est due, huit jours après la réception ou selon les modalités (calendrier) prévues dans le contrat.

Que faire pendant la réception des travaux ?

Pour une grande partie des opérations habituelles, la réception des travaux n'est qu'un simple constat amiable que le travail demandé a bien été effectué. En revanche, c'est une étape importe quand ils s'agit de travaux de grande ampleur, essentielle dans le cadre de la construction d'une maison.

Pas de soucis donc lorsqu'ils s'agit de petits travaux. Encore que… Si vous estimez que la nouvelle peinture du salon a été bâclée, c'est en réceptionnant le travail qu'il vous faut émettre des réserves, par écrit.

En revanche, la réception des travaux est une étape très importante pour les gros travaux ou la construction d'une maison car elle détermine véritablement le moment à partir duquel vous prenez possession des lieux et en devenez responsable. Elle doit s'effectuer en compagnie d'un représentant de l'entreprise qui a réalisé les travaux ou la construction ; vous pouvez vous-même vous faire accompagné d'un expert. Il ne faut pas hésiter à inspecter minutieusement les éventuels défauts et vices de votre bâtiment ou du travail réalisé. Autant, si vous êtes satisfait de la réalisation, il n'est pas obligatoire de faire un écrit, autant, en cas de doute, il faut impérativement mentionner sur un procès verbal, en deux exemplaires, toutes vos remarques et réserves éventuelles. Car, attention, le fait de prendre possession des lieux et payer le ou les entreprises qui ont réalisés les travaux revient à accepter la réception de l'ouvrage.

En cas de réserves, il est possible, voire souhaitable, de consigner (article R231-7 du code de la construction et de l'habitat pour ce qui concerne la construction d'une maison individuelle) une partie de la rémunération de l'entrepreneur, une somme qui ne peut excéder 5% du prix convenu à la signature du contrat. Cette somme doit être restituée après la levée des réserves, c'est-à-dire quand les réparations éventuelles par exemple ont été effectuées, le délai de ces travaux devant être également consignés par écrit. La Caisse des dépôts et de consignation(CDC) est l'organisme habilité à recevoir la somme consignée. Plusieurs documents seront à fournir, comme une déclaration de conformité à la réglementation, le procès verbal des travaux avec mentions des réserves et le montant des travaux. Les modalités de restitutions doivent également être précisées. A noter que la Banque de France peut également consigner cette somme ainsi que, par accord bipartite, un garant. Sauf mention explicite, la CDC reste l'organisme auquel s'adresser par défaut, la plupart des banques refusant d'assurer ce rôle.

Si le désaccord entre vous-même et l'entreprise est trop grand, vous pouvez refuser la réception. Dans ce cas, la date de réception est soit reportée à l'amiable, soit par décision d'un juge des référés, voire, si vraiment les choses ne se passent pas bien, par décision du tribunal de grande instance qui peut exiger l'achèvement des travaux sous astreinte, c'est à dire avec des pénalités par jour de retard.

Gardez quand même à l'esprit qu'il faut des raisons fondées pour sortir la grosse artillerie. Un carreau cassé dans la cuisine ou un appareil qui ne correspond pas à la marque prévue font l'objet de réserves, pas de menaces.

Enfin, si vous n'êtes pas assisté par un professionnel, vous disposez alors d'un délai supplémentaire de 8 jours pour formuler des réserves sur des défections non signalées sur le procès-verbal de réception, par lettre recommandée avec accusé de réception ou exploit d'huissier. Ce qui explique que le versement des 5% restant n'est dû que dans les 8 jours si aucune réserve n'est formulée. En cas de réserves, le versement du solde de 5% a lieu à la levée de celles-ci.

  • A noter : pour finir que c'est à partir de la date de réception que courent les garanties.

Quelles sont les clauses abusives et comment les éviter ?

Le code de la consommation, complété par la jurisprudence, indique les conditions générales pour reconnaître les clauses d'un contrat considérées comme abusives qui s'appliquent aux travaux. Des règles particulières concernent les contrats de construction de maison individuelle.

Selon l'article L.132-1 du code de la consommation, «sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat». L'abus est donc constitué par un déséquilibre flagrant entre les deux co-contractants, au détriment du particulier et au profit du professionnel. Ce déséquilibre peut trouver sa source en de multiples endroits (devis, facture, ticket, bons de commande ou bons de livraison par exemple).

Aussi, le code de la consommation précise les différents cas de figures, constituant un abus, dont :

  • l'exclusion ou la limitation des responsabilités légales du professionnel.
  • Un engagement ferme du client alors que l'exécution du service par l'entrepreneur ne dépend que de sa seule volonté.
  • Une pénalité disproportionnée imposée au client en cas de non-respect de ses engagements.
  • L'autorisation donnée à l'entrepreneur de changer les conditions du contrat ou les caractéristiques du service à livrer.
  • La prévision du prix à la livraison seulement ou l'augmentation du prix par l'artisan sans accorder au client un droit de résiliation du contrat si le prix est trop élevé par rapport au prix de départ.
  • La limitation de l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur.Dans le cadre précis d'un contrat de construction de maison individuelle, d'autres clauses viennent s'ajouter à la liste, explique l'Agence nationale pour l'information sur le logement (ANIL).

Sont donc à proscrire :

  • Les clauses qui vous obligent à donner mandat au constructeur pour qu'il recherche les prêts dont vous avez besoin, sans que ce mandat soit exprès et précis sur les conditions de prêts souhaitées.
  • Les clauses ne vous permettant pas d'obtenir le remboursement de votre dépôt de garantie, pour cause du refus de plusieurs demandes de prêts.
  • Les clauses indiquant qu'un permis de construire, accordé sous réserve de modifications techniques ou architecturales du projet, est considéré comme obtenu, dès lors que ces mêmes réserves entraînent une remise en cause du projet ayant donné lieu à la conclusion du contrat.
  • Les stipulations indiquant que la remise des clés, lors de la réception, est subordonnée au paiement intégral du prix.
  • Les clauses vous interdisant de visiter le chantier préalablement aux versements des échéances et à la réception des travaux. Notez cependant que même si l'une de ces clauses figure sur votre contrat - une erreur d'inattention pourquoi pas -, le droit français la considère comme non écrite. Vous n'êtes donc pas tenu de vous y conformer. Par contre, le contrat continue de s'appliquer.

Cependant la liste ci-dessus n'est pas exhaustive puisque la justice, par le biais de la jurisprudence, peut être amenée à se prononcer. Par contre, si vous estimez en toute bonne foi qu'une clause sur votre contrat est abusive, il faut alors engager une action en justice, ce qui n'est pas forcément une mince affaire. N'hésitez pas en ce cas à demander l'aide d'une association de défense de consommateurs qui a capacité d'attaquer en justice. Selon le site de l'association Consommation Logement et cadre de vie (CLCV).

Trois voies de recours sont possibles :

  • L'action civile. Il s'agit de demander au juge d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer une clause illicite contenue dans les contrats proposés aux consommateurs.
  • L'action en suppression de clauses abusives. Il s'agit de demander à la juridiction d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression de clauses abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs.
  • Une association agrééepeut agir en réparation si elle est mandatée par au moins deux consommateurs, ayant subi des préjudices individuels de la part d'un même professionnel et qui ont une origine commune.Il reste qu'il vaut mieux en amont être attentif au contrat, quitte à le faire lire par un professionnel en cas de doute, plutôt que de se retrouver plus tard à devoir entamer, seul le plus souvent, une procédure sur la base de l'action civile.

Rappelons enfin que, a contrario, plusieurs mentions sur le devis ou le contrat sont obligatoires. Pour plus de précisions lire :

Comment gérer l'abandon de chantier ?

Tout semblait bien parti : contrat signé, les travaux avaient débuté, etc.. Puis, les ouvriers ont soudainement déserté le chantier. Dans la majorité des cas, cette interruption des travaux a une explication légitime. Quand ce n'est pas le cas, les vrais soucis commencent et le seul recours, ou presque, est de saisir le Tribunal.

Avant d'accepter un abandon temporaire de chantier, les raisons, on s'en doute, doivent être motivées. Ces raisons peuvent être multiples et légitimes, d'autant plus quand elles n'affectent pas les délais de livraison.

Il peut s'agir ainsi d'une interruption momentanée, sans conséquence grave pour la suite des opérations, dans le cas par exemple où des raisons familiales sérieuses empêchent l'entrepreneur ou l'artisan de se rendre sur le chantier un ou plusieurs jours. Par ailleurs, l'entrepreneur, comme l'artisan d'ailleurs, a souvent plusieurs chantiers en cours en même temps et l'un d'eux peut nécessiter en urgence une attention particulière ou un surplus de main d'oeuvre. Ils peuvent également tout simplement avoir pris de l'avance avec votre chantier et décider de se consacrer entièrement, pendant quelques jours, à un chantier qui aurait pris du retard. En clair, interruption des travaux ne signifie pas nécessairement abandon de chantier.

Également, des circonstances exceptionnelles peuvent être invoquées. Des intempéries peuvent empêcher la bonne tenue des travaux, un cas de force majeure peut subvenir (inondations, séisme, etc.) ou tout autre évènement indépendant de la volonté de l'entrepreneur. Il peut également, au pire, s'agir d'un évènement grave - un accident par exemple - qui fait que, sans que la légitimé de l'arrêt ne puisse être mise en cause, l'abandon sera plus long que simplement 'momentané'. Là encore, le Maître d'ouvrage doit être prévenu.

A noter :

  • un abandon de chantier est parfois dû au non respect par le Maître d'ouvrage de ses obligations - non règlement des acomptes par exemple,
  • en revanche qu'un désaccord entre l'entreprise et vous-même n'est, en aucun cas, une raison valable d'abandon de chantier.

Quand l'abandon de chantier n'est pas motivé par une raison sérieuse, c'est là que commencent les vrais problèmes. Il faut distinguer deux cas de figure :

  • Le premier concerne des travaux effectués par un artisan. Après quelques jours de patience et en l'absence de toute explication - on ne retourne pas vos coups de fil, vous n'arrivez à joindre personne au sein de l'entreprise - vous devez alors mettre votre interlocuteur en demeure de reprendre le chantier par l'intermédiaire d'une lettre recommandée avec accusé de réception. L'Agence nationale pour l'information sur le logement (ANIL) recommande alors d'indiquer dans le courrier un délai pour la reprise effective. «N'acceptez jamais de versement anticipé en espérant que l'entreprise finira les travaux», précisent alors les fiches conseils de l'Institut national de la consommation (INC-60 millions de consommateurs». Si la reprise n'est pas effective, et après une constatation d'huissier en bonne et due forme, la procédure en référé - vous pouvez alors vous adresser au Tribunal de Grande Instance - peut permettre à un juge d'ordonner la reprise des travaux sous astreinte. Le cas échéant, vous pourrez prendre une autre entreprise voire réclamer des dommages et intérêts. Là encore, avant d'en arriver à ces extrémités - coûteuse en temps et énergie - n'hésitez pas à faire appel à des organisations professionnelles ou des associations pour tenter de régler au mieux le problème à l'amiable.
  • Dans le cas de la construction d'une maison individuelle, en cas d'abandon de chantier, vous devez prévenir l'établissement de crédit qui garantit la livraison des travaux. Ce dernier pourra alors à son tour enjoindre le constructeur de reprendre le chantier, qui s'avère souvent plus ouvert à la discussion quand il a le sentiment que vous n'agissez pas seul. En cas d'interruption non justifiée et prolongée, il vous faudra également saisir le tribunal des référés. Attention, prévenir l'établissement de crédit dans ce cadre est une démarche importante puisque cet établissement pourra, le cas échéant, désigner de nouveaux professionnels pour achever l'ouvrage. Vous pourrez éventuellement choisir vous-même les entreprises qui effectueront les travaux restant à effectuer «à condition que l'immeuble ait atteint le stade du hors d'eau (les travaux de pose de toitures et d'isolation ont été effectués NdR)», précise la documentation de l'ANIL. Le garant versera alors directement aux entrepreneurs concernés les sommes correspondant aux travaux à effectuer.Enfin, dernier cas d'espèce. Si l'entreprise que vous avez choisi a abandonné le chantier parce qu'elle se trouve en redressement judiciaire, vous devez alors vous adresser au greffe du tribunal de commerce du siège de l'entreprise afin d'obtenir le nom et l'adresse de l'administrateur judiciaire, et régler la question directement avec lui, conseille l'association de défense des consommateurs.

Il y a un écart entre le montant du devis et la facture finale. Est-ce normal ?

Le devis a valeur de contrat, les avenants également. Ainsi, si le coût prévu au début des travaux ne correspond pas au prix final, il peut y avoir plusieurs raisons. De bonnes et de mauvaises.

Commençons par les bonnes : Tout travail mérite salaire. Les travaux réalisés dans votre logement par l'artisan doivent être payés, conformément aux accords pris par écrit avec lui. «Le devis signé a une valeur de contrat», rappelle Ludovic Denys, avocat à Lille (59) spécialisé dans le droit de la construction. Et dans le devis, le prix fixé fait partie des clauses impondérables. Sauf que dans les faits, les choses ne se passent jamais exactement comme prévu. Vous avez par exemple décidé de changer la robinetterie prévue pour une meilleure marque. Non seulement il peut donc y avoir une différence de prix, que vous avez prise en compte. Mais encore faut-il que l'artisan aille la chercher, démonte les robinets déjà posés et remonte les autres.

Dans cette situation, il y a plusieurs cas de figure :

  • Le premier : vous discutez en amont avec le professionnel et signez un avenant au devis, et au contrat s'il y en a un, décrivant précisément les différents éléments à prendre en compte (temps et coût du déplacement, heures de travail supplémentaire, différence de prix unitaire, etc.). L'avenant ayant également valeur de contrat, la somme correspondante doit être payée. Vous pouvez faire autant d'avenants que nécessaire tout en gardant à l'esprit que le temps passé à signer et resigner les documents sera éventuellement facturé. Ne perdez pas de vue non plus que le chantier de l'artisan s'inscrit dans un calendrier précis. Vous ne pouvez pas par exemple, en grossissant le trait, estimer que la toiture serait plus belle en ardoises alors que le couvreur vient de poser la dernière tuile et exiger, dans l'hypothèse où le surcoût n'est pas un souci, qu'il s'exécute sur le champs.

  • Second cas de figure. Vous avez discuté avec l'artisan d'une modification quelconque mais vous n'avez rien signé. «Il s'agit d'un cas de figure fréquent car le professionnel marche souvent à la confiance», explique l'avocat lillois. Même sans avenant, «ces travaux supplémentaires doivent cependant apparaître sur la facture et, bien sûr, également être réglés», insiste-t-il. Chose promise, chose due.La mauvaise nouvelle maintenant. Vous n'avez discuté de rien avec votre interlocuteur et ce dernier vous soumet une facture dont le prix diffère notablement, sans autres explications, avec le montant du contrat ou du devis initial. Vous êtes alors dans votre droit de refuser de payer la différence et de vous en tenir au prix du devis initial. Si l'artisan a par exemple mal évalué au départ le coût ou la difficulté des travaux, il devra en assumer seul les conséquences.

En tout état de cause ces agissements, où la mauvaise foi est manifeste, du moins pour de petits travaux d'entretien ou de rénovation, sont rares, l'entreprise ne pouvant compter conserver longtemps une clientèle. D'ailleurs, pour tous travaux, l'Institut national de la consommation (INC - 60 millions de consommateurs) recommande de fixer à la signature du contrat un prix forfaitaire ferme et définitif, pour être protéger justement, contre ces erreurs d'évaluations. (Dans certaines circonstances, lors de l'élaboration du devis, des entreprises vous proposeront de déroger à cette règle pour des items spécifiques, en cas de hausse inconsidérée des matières premières par exemple. Vous n'êtes pas obligé d'accepter mais l'entreprise peut en ce cas refuser le chantier). Enfin il peut se produire des évènements imprévisibles où la bonne foi de l'entrepreneur n'est pas en cause. Par exemple, un éboulement de terrain chez le voisin sabote le travail réalisé. Vous ne pouvez faire porter, en ce cas, toute la responsabilité sur l'artisan ou l'entrepreneur qui effectue vos travaux. En ce cas, tournez vous d'un commun accord vers vos assurances respectives.

Qui est compétent pour régler les litiges ?

Lors d'un conflit, plusieurs intervenants peuvent intervenir en vue de le résoudre. Outre le juge et les avocats, peuvent intervenir l'huissier, l'expert ou encore les conciliateurs, civils ou issus des organisations professionnelles et même les assureurs.

Que vous ayez subi un abandon de chantier, une malfaçon ou des retards dans la réalisation des travaux, la démarche en cas de conflit reste relativement similaire. Elle peut se résumer au triptyque «huissier - expert - tribunal».

En premier lieu, avant toute démarche, il faut en priorité tenter de régler le conflit à l'amiable en s'adressant directement à l'entrepreneur en vue de régler la question. Et si possible dès que en percevez la nécessité ; autant éviter qu'un simple malentendu se transforme en guerre de tranchées. Des associations jouent parfois un rôle de médiateur. Le Centre de Conseil et Assistance aux usagers de l'habitat (CDAU) en est une possédant une bonne expérience. Souvent, la seule présence d'un médiateur extérieur permet de dépassionner les débats et le CDAU se targue de résoudre la majorité des conflits auxquels il est confronté. Mais il y a d'autres associations de ce type.

Si cette démarche échoue, les choses sérieuses commencent. «Adressez une lettre de mise en demeure en recommandé avec accusé de réception», conseille l'Institut national de la consommation (INC - 60 millions de consommateurs) dans ses fiches explicatives. Si rien ne se produit, la prochaine étape consiste à faire constater l'objet du litige par un huissier.

Par la suite, le recours au tribunal s'impose, devant le Tribunal d'Instance pour les conflits n'excédant pas 7.600 euros et le Tribunal de Grande Instance au-delà de cette somme. Vous pouvez demander une injonction d'exécution des travaux en référé ou tenter une conciliation, avec le juge pour arbitre, si le conflit porte sur des travaux inférieurs à 3.800 euros. Si le conflit s'éternise, le juge devra alors désigner un expert pour évaluer la portée véritable de la dissension. Le magistrat n'est pas tenu de suivre son avis. De même, «l'expert n'est pas non plus tenu de rédiger un rapport si par exemple, la malfaçon n'est pas avérée», précise Martine Faury, avocate à Angoulême (16).

Reste qu'avant d'aller devant le tribunal, vous pouvez toujours tenter encore la conciliation, par l'intermédiaire des «médiateurs civils», il y en a dans chaque ville (qui dispose d'un tribunal NdR), assure l'avocate. Par ailleurs, il est également possible de s'adresser aux instances professionnelles, comme la Fédération française du bâtiment (FFB) ou la Confédération de l'Artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB). Les organismes qui dispensent des labels, comme Qualibat, peuvent également vous venir en aide. Si le conflit porte avec l'architecte maître d'œuvre, les Conseils régionaux de l'Ordre des architectes (CROA) disposent également de cellules de conciliation.

Enfin, il est toujours possible de s'adresser au garant ou à l'assureur de l'entreprise pour être dédommagé. Méthode de plus en plus usitée et «qui a permis de réduire le nombre de conflits devant les tribunaux», selon Martine Faury. Quoiqu'il en soit, «il s'agit de faire vite», selon l'avocate, lorsque la nécessité d'entamer des procédures. «La plupart du temps, les particuliers laissent traîner les choses», ce qui amène ensuite des procédures rallongées. Bref, ne prenez pas huit mois pour vous engager. Quant au choix de votre avocat, sauf cas particulièrement ardu ou représentant de très grosses sommes, il n'est pas nécessaire de prendre un avocat spécialisé en droit de la construction (à moins que ce ne soit pour une opération de très grande envergure), un avocat généraliste convient parfaitement généralement.

Contactez des artisans afin qu'ils vous établissent un devis précis pour votre projet.